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vendredi 28 novembre 2014

Sophocle - Œdipe Roi

   Ce n'est pas vraiment dans mes habitudes de lire des pièces de théâtre, encore moins d'assister à des représentations théâtrales. Je dois vous avouer que le théâtre n'est pas mon genre de prédilection. Cependant... comme dirait mon professeur de Grec (oui je suis helléniste), "Qui n'a pas lu Œdipe Roi n'a rien lu". Je l'avais déjà lu il y a fort longtemps, alors j'ai décidé de m'y replonger.
 
Titre: Œdipe Roi
Auteur: Sophocle
Genre: tragédie
Date de publication: Vème siècle av. J-C
Pays: Grèce
 
Résumé
   Œdipe, roi de Thèbes, voit son peuple confronté à un terrible fléau: une malédiction s'est abattue sur la ville. Son beau-frère Créon lui conseille alors de consulter le devin Tirésias pour trouver le moyen d'apaiser le courroux des dieux. Celui-ci serait dû au meurtre impuni du prédécesseur d'Œdipe sur le trône de Thèbes, le roi Laïos. Devant l'insistance du roi, Tirésias finit par avouer le nom du meurtrier: c'est Œdipe lui-même. En effet, frappé par une malédiction divine, Laïos devait enfanter un fils qui le tuerait et épouserait sa propre mère. Effrayé par cette prophétie, lorsqu'un enfant lui était né, il l'avait abandonné dans un ravin. Mais un berger de Corinthe avait recueilli le petit Œdipe et l'avait confié aux souverains de sa ville qui ne parvenaient pas à avoir d'enfants. Devenu plus âgé, Œdipe était parti pour Thèbes afin d'échapper à la prophétie lui annonçant qu'il allait tuer celui qu'il croyait être son père et épouser sa mère. A la croisée d'un chemin, à la suite d'une altercation entre voyageurs, Œdipe avait tué un homme et sa suite. Arrivé à Thèbes, il était parvenu à trouver la solution de l'énigme du Sphinx, libérant ainsi la ville de ce monstre. Il avait alors été sacré roi à la place de Laïos assassiné, et avait épousé sa veuve. Mais il faudra toute la pièce à Œdipe pour qu'il comprenne enfin la funeste vérité...
 
Mon avis
   Comment j'ose donner mon humble avis sur ce monument de la littérature, qui a été un des mythes fondateurs de notre civilisation gréco-latine, une pièce vieille d'il y a plus de 25 siècles, qui a inspiré à Freud sa célèbre théorie psychanalytique du complexe d'Œdipe, je me le demande... je vais cependant essayer.
   Comme vous pouvez l'imaginer, et comme toute tragédie, mais particulièrement celles de Sophocle, Œdipe Roi est caractérisé par le poids écrasant de la fatalité qui pèse sur les personnages. Dès le début de la pièce, on sait que tout va mal se terminer pour ceux qui ont voulu échapper à leur destin. La double horreur du parricide et de l'inceste poursuit le héros jusqu'à la fin. Sa chute sera terrible lors du dénouement. En ceci réside le génie de cette tragédie: le lecteur ou le spectateur observe tout le long de la pièce des personnages qui se débattent contre leur destinée, mais qui fatalement ne pourront lui échapper. Leur faiblesse est totale face à la toute-puissance des dieux. Il faut reconnaître que cela fait frissonner...
   Je dois maintenant vous avouer que j'ai un faible pour la littérature grecque de l'Antiquité, sûrement bien plus que pour la littérature latine. Non seulement, en helléniste convaincue, je tiens la langue grecque pour une des plus esthétiques du monde, mais je suis particulièrement sensible à la beauté, à la poésie, à la force des textes grecques de l'Antiquité. Dernièrement, j'ai été profondément touchée par la magnifique maîtrise de la langue dont fait preuve Lysias dans son discours Sur le meurtre d'Eratosthène. Œdipe Roi ne fait pas exception. La beauté du langage et la force de l'ironie tragique y sont vraiment impressionnantes. J'ai particulièrement aimé un passage du début de la pièce, le dialogue qui voit s'affronter Œdipe qui brûle de connaître le nom du meurtrier de Laïos et le devin Tirésias qui tente de le dissuader de chercher à connaître la vérité, justement pour ces raisons. En outre, par nature, une pièce de théâtre est destinée à être jouée. Je crois bien que c'est la première fois que je n'ai presque pas ressenti de frustration en lisant une pièce de théâtre, car j'ai trouvé les dialogues tout simplement magnifiques si bien que je pense que cela a suffi à mon bonheur !!!
   J'ai cependant un tout petit bémol à ajouter. Même si les personnages comme les interrogations qu'ils suscitent sur le destin sont tout à fait humains et intemporels, j'ai toutefois bien ressenti que cette tragédie avait quelques siècles. En effet, l'écrasement complet des personnages sous le poids du destin ne laisse selon moi pas énormément de place à l'analyse des sentiments, contrairement aux tragédies de Corneille par exemple. De plus, on n'est pas vraiment habitué à cette présence du chœur et à ses chants qui m'ont paru quelquefois obscurs.
   Il n'en demeure pas moins que cette tragédie est, à mon avis, un pur chef-d'œuvre, un bijou de la littérature occidentale, à lire et à faire lire de toute urgence.

Mon verdict
   5/5 bien sûr, un vrai chef-d'œuvre
 

samedi 7 juin 2014

Albert Camus - L'Etranger

  Un article sur un grand classique de la littérature française du XXème siècle.

Titre: L'Etranger
Auteur: Albert Camus
Genre: roman
Année de publication: 1942
Pays: France

Résumé
   Dans l'Algérie française des années 40, un homme, Meursault, modeste employé, vient de perdre sa mère. Ce deuil ne semble pas l'affliger plus que ça puisque, le lendemain même, il prend pour maîtresse une jolie jeune femme, Marie. Lors d'un séjour chez un ami, Raymond, Meursault se trouve amené à tuer un Arabe, ennemi de Raymond, alors qu'il n'est pas en pleine possession de ses moyens. Il est alors arrêté, mis en prison, et a la sensation que sa vie lui échappe, sans paraître plus s'en préoccuper.

Mon avis
   Ce livre m'a beaucoup surprise, principalement à cause du personnage étrange et indéchiffrable de Meursault. L'insensibilité, le fatalisme de ce personnage somme toute ordinaire, ni bon ni mauvais, mais n'éprouvant presque aucun sentiment, m'ont frappée. Le personnage, qui est également narrateur, est accablé par le poids du destin, de la fatalité, de l'absurdité de la vie. Son absence totale d'espérance, qui ne va même pas jusqu'au désespoir profond, mais qui est mêlée d'une résignation indifférente, m'ont terrifiée. Meursault est un incompris (d'où le titre, L'Etranger); 
; les autres personnages veulent absolument faire de lui un monstre.
   Le thème principal du roman est donc le destin: pour un moment d'égarement, pour quelques gestes insignifiants comme avoir pris du café au lait devant le corps de sa mère morte alors qu'il la veillait, détail qui aura beaucoup de poids le jour de son procès, la vie de Meursault lui échappe, il est condamné. Meursault n'a pas eu de chance, quelques coïncidences fatales l'ont mené vers la mort. On pourrait rapprocher cette oeuvre de la nouvelle La Parure, de Maupassant, où l'on perçoit de la même façon la toute-puissance du destin.
   Quant au style, il est, je l'avoue, un peu déroutant, surtout par le recours quasi-systématique au discours indirect ou indirect libre, qui sert pourtant de façon admirable cette distanciation du personnage par rapport aux évènements qu'il vit.
 
Mon verdict
4/5; un admirable roman tragique

   Je ne résiste pas au plaisir de partager quelques citations, très connues d'ailleurs, mais tout à fait représentatives du roman:
"Aujourd'hui maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas." (Incipit du roman)
"Je n'avais pas fait telle chose alors que j'avais fait telle autre. Et après ? [...] Rien, rien n'avait d'importance et je savais bien pourquoi. Du fond de mon avenir, pendant toute cette vie absurde que j'avais menée, un souffle obscur remontait vers moi à travers des années qui n'étaient pas encore venues et ce souffle égalisait alors dans son passage tout ce qu'on me proposait alors dans les années pas plus réelles que je vivais."