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samedi 9 mai 2015

Emile Zola- Thérèse Raquin

   Ah Zola... Zola qui a été à l'origine de ma passion pour la littérature... Il FALLAIT que je découvre autre chose que sa grande série des Rougon-Macquart. J'ai jeté mon dévolu sur Thérèse Raquin, un de ses premiers romans. Comme promis dans mon billet précédent, je vous livre ici mes impressions.

Titre: Thérèse Raquin
Auteur: Émile Zola
Genre: roman
Date de publication: 1863
Pays: France

Résumé
   Thérèse, orpheline, est élevée par sa tante, Madame Raquin, ancienne mercière, en même temps que son cousin Camille, garçon souffreteux choyé à l'excès par sa mère. La jeune fille rêve de grand air et de liberté et étouffe dans cette atmosphère étriquée. Elle prend alors le masque d'une jeune fille soumise. Devenue jeune fille, elle épouse Camille, conformément aux projets de sa tante, malgré sa répugnance. Sur un coup de tête de Camille, la famille ouvre une mercerie à Paris dans un boyau humide. Thérèse a horreur de la vie médiocre et austère qu'on lui impose mais n'en laisse rien paraître. Son mari amène un jour chez eux un ami d'enfance, Laurent. Homme de la campagne, sa force et sa santé séduisent d'emblée Thérèse qui devient sa maîtresse. Les deux amants vivent une relation passionnée, à tel point que l'idée leur vient de supprimer l'encombrant mari. Lors d'une promenade en barque, Laurent jette Camille à l'eau. Les amants seront dès lors tourmentés par le remords.

Mon avis
   J'ai trouvé ce roman assez différent des œuvres de Zola que j'avais lues. En effet, le naturalisme est à ses débuts à l'époque de la rédaction de Thérèse Raquin, et le déterminisme social, s'il est présent à travers l'origine paysanne de Laurent ou la mère algérienne de Thérèse, prend moins de place que dans L'Assommoir par exemple. De même pour l'analyse sociale. De la même façon, le roman est beaucoup moins "scientifique" que les œuvres de la série des Rougon-Macquart puisque certains songes et l'évocation du remords confine au fantastique (le roman m'a d'ailleurs un peu fait penser au Horla de Maupassant, pour cet aspect). J'ai donc apprécié le fait de découvrir un autre aspect du talent de Zola.
   Comme je l'ai dit , le roman se rapproche parfois du fantastique, ce qui lui confère une atmosphère sombre, très sombre et inquiétante. Et cette atmosphère tient aussi à la présence de la fatalité: Laurent et Thérèse sont rattrapés par leur acte meurtrier, même s'ils ne sont pas poursuivis par la justice, si bien que le bonheur qu'ils visaient en tuant Camille se transforme en cauchemar et en pugilat permanent. Cette analyse était, j'ai trouvé, très intéressante.
   La critique sociale, comme dans la grande majorité des romans zoliens, est aussi présente. Les petits-bourgeois du XIXème sont croqués d'une manière féroce et passionnante.
   Avec l'univers sombre des merceries parisiennes, j'ai retrouvé des similitudes avec Pot-Bouille et Au Bonheur des Dames qui m'ont amusée.
   Et la langue de Zola est toujours un plaisir...divin.
   Le roman n'a pas manqué de me faire penser à Thérèse Desqueyroux, de François Mauriac; les deux Thérèse se ressemblent par leur caractère au début des deux romans et souffrent toutes les deux d'un mariage malheureux, mais Thérèse Raquin se révèle bien plus mesquine et minable que Thérèse Desqueyroux, qui garde jusqu'au bout son statut d'héroïne indéchiffrable.

Mon verdict

   5/5, une évocation magistrale du remords
J'ai lu ce livre dans une édition à la couverture absolument horrible, celle-ci:

dimanche 26 avril 2015

Laclos - Les Liaisons dangereuses

    Me revoilà avec un classique un peu sulfureux...

Titre: Les Liaisons dangereuses
Auteur: Pierre Choderlos de Laclos
Genre: roman épistolaire
Date de publication: 1782
Pays: France

Résumé
   La Marquise de Merteuil et le Vicomte de Valmont sont deux libertins, multipliant les aventures. Anciens amants, ils s'écrivent régulièrement. C'est cette correspondance fictive, à laquelle s'ajoute celle de quelques autres protagonistes de l'intrigue, qui est présentée dans ce roman. La Marquise de Merteuil, jeune veuve que toute la bonne société croit irréprochable, veut se venger d'un de ses anciens amants. Pour cela, elle imagine de débaucher sa jeune fiancée, Cécile de Volanges, fraîchement sortie du couvent. De son côté, le Vicomte de Valmont veut séduire une femme mariée, la Présidente de Tourvel. Mais Madame de Volanges met en garde la Présidente contre Valmont, gâtant ainsi ses chances. Il décide donc de s'allier à la marquise pour déshonorer la jeune Cécile et faire éclater un scandale après son mariage. La Marquise, qui a ses entrées chez les Volanges, deviendra pour cela la confidente de Cécile, la poussant dans les bras d'un jeune homme amoureux d'elle, le Chevalier Danceny. De son côté, le Vicomte gagnera la confiance du Chevalier afin de le manipuler.

Mon avis
   Je vous avoue tout d'abord que je ne suis pas une grande amatrice de romans du XVIIème ou du XVIIIème, ni de romans épistolaires. Pourtant...j'ai bien dû réviser mon avis.
   En effet, j'ai vraiment apprécié ce roman. Cela tient principalement à l'admirable analyse des sentiments. Le paradoxe est que, si les Liaisons traitent principalement d'amour, c'est bien le sentiment le moins présent, au détriment de l'envie, de la jalousie, du ressentiment, de l'orgueil, et de l'amour-propre. C'est donc tout d'abord cette originalité qui m'a intéressée. En effet, de tous les personnages, aucun n'est vraiment et sincèrement amoureux, puisque même les personnages les plus candides, Cécile et le chevalier, tireront profit des "leçons" des deux comparses et feront preuve de duplicité. 
   Le thème principal du roman est donc la manipulation. Alors que personne ne s'en doute, ce sont la marquise et le Vicomte qui tirent les ficelles de l'intrigue pour parvenir à leurs fins. Les personnages, tant manipulateurs que manipulés, sont remarquablement esquissés: les deux libertins sont épouvantables de cynisme et, il faut le dire, d'ingéniosité; les autres sont finalement totalement écrasés par ces deux figures de démiurges, n'ayant à leur opposer que leur naïveté, leur crédulité, et leur manque de discernement. Les personnages les plus sympathiques sont finalement, je trouve, la Marquise et le Vicomte, puisque leur ingéniosité et, finalement, leur lucidité froide et calculatrice est bien plus intéressante que la faiblesse des autres. Cette supériorité de personnages aussi noirs confère donc au roman une bonne part de son intérêt et de son originalité.
   En ce qui concerne l'intrigue, d'ailleurs passionnante, les machinations machiavéliques se succédant à une cadence impressionnante, je n'ai eu qu'une seule petite déception: j'ai en effet trouvé la fin un peu clémente pour certains personnages et un peu trop "morale"; mais sans doute l'époque l'exigeait-elle.
   De plus, j'ai redécouvert le roman épistolaire; il est vrai que ce genre m'a donné une nostalgie de ce moyen de communication merveilleux qu'est la lettre, qui invite, je trouve, à l'usage du beau langage. En tant que philatéliste, mon amour de la lettre était déjà bien présent, mais en tant que membre d'une génération où l'on n'écrit plus, ce roman m'a donné envie de reprendre la plume.
   Ma conquête a été cependant achevée par l'humour du ton persifleur de la Marquise et du Vicomte, chez qui on découvre parfois des insinutions peu amènes assez amusantes.

Mon verdict
   4,5/5; un savoureux roman sur la manipulation et la noirceur de l'âme humaine

   

lundi 23 février 2015

Daniel Defoe - Robinson Crusoë

   Comme vous le savez peut-être, j'ai dû lire, œuvre que je présenterai au bac de Français, Vendredi ou les limbes du Pacifique, de Michel Tournier, une réécriture de Robinson Crusoë, de Daniel Defoe. J'avais déjà lu et relu de nombreuses fois dans mon jeune temps ce roman, mais dans l'édition abrégée de la Bibliothèque Verte. Comme nous devions le lire pour la rentrée des vacances de février, c'était pour moi l'occasion rêvée de me replonger dans un roman d'aventures qui m'avait passionnée jadis...

Titre: Robinson Crusoë
Auteur: Daniel Defoe
Genre: roman d'aventures
Date de publication: 1719
Pays: Royaume-Uni

Résumé
   Robinson Crusoë, jeune homme possédé par le démon de l'aventure et l'envie de courir le monde, s'embarque un jour, au mépris des recommandations paternelles, sur un navire. Hélas, le navire est capturé par des Maures chez qui Robinson devient esclave. Cependant, il parvient un jour à tromper leur surveillance et à s'échapper sur un petit bateau de pêche. Il est alors recueilli par un capitaine portugais et aborde au Brésil où il s'établit comme planteur. Quelques années plus tard, alors que son exploitation prospère, il entreprend un voyage d'affaire, et c'est alors que son bateau fait naufrage et qu'il s'installe, seul rescapé, sur une île déserte. 

Mon avis
   Ce qui m'avait énormément plu quand, petite, j'avais lu et relu Robinson Crusoë, c'était l'interminable description de ses installations dans l'île, que j'essayais vainement de reproduire sous forme de cabanes plus ou moins branlantes. Il est vrai que l'ingéniosité que déploie Robinson est véritablement fascinante, et que la façon dont il parvient à vivre tout à fait convenablement et heureusement alors qu'il est dénué de tout est, je trouve, vraiment inspirante, c'est une leçon d'optimisme et de persévérance.
   J'ai été aussi très surprise de constater que l'édition abrégée que je connaissais avait été amputée de pas moins de la moitié du roman, portant principalement sur les aventures de Robinson en tant que marchand après son départ de l'île, et le devenir de la colonie qu'il a laissée sur l'île elle-même. Si j'ai été libérée de l'impression d'inachevé que je ressentais à chaque lecture du roman abrégé, j'ai par contre trouvé certaines péripéties et aventures d'un rocambolesque qui devenait parfois, je trouve, assez répétitif et ennuyeux, d'autant plus que le roman est vraiment très long.
   J'ai également mieux réalisé la portée religieuse du roman, avec les méditations de Robinson sur Dieu et l'évangélisation, qui reflètent bien la pensée de l'époque mais sont cependant vraiment intéressantes.
   Le personnage de Robinson m'a paru assez sympathique, puisqu'il s'agit d'un personnage tout de mesure, de prudence, de raison, pacifique et relativement tolérant, dont les relations avec Vendredi sont touchantes. En somme, c'est un vrai "honnête homme" du XVIIème siècle.
   J'ai trouvé qu'il émanait de ce roman un certain optimisme, qui en rend la lecture vraiment agréable, ce que je n'avais pas ressenti dans le cas du roman de Michel Tournier, où le personnage de Robinson est beaucoup plus sombre, moins mesuré, mais aussi plus complexe et dont l'évolution se ressent tout au long du roman.
   Quant au style, je répète que le XVIIème siècle n'est pas vraiment mon siècle favori. En effet, je trouve que l'écriture des auteurs de romans du XVIIème est souvent assez lourde et que leurs tics d'écriture sont agaçants. Je ne ressens pas du tout la même chose en ce qui concerne les auteurs du XVIème (merveilleux Montaigne), du XIXème (romantiques et réalistes) et du XXème. En tout cas, le style de Daniel Defoe ne m'a certes pas emballée, mais ne m'a pas énervée non plus. Considérons donc que je l'ai trouvé correct, d'autant plus que certains traits d'humour tout britanniques m'ont bien fait sourire.

Mon verdict
4/5, un roman positif

mardi 10 février 2015

Stefan Zweig - Lettre d'une inconnue

   Après une éprouvante semaine de devoirs, je reviens avec ma dernière lecture, une oeuvre de Stefan Zweig dont j'avais déjà entendue parlé, mais c'est l'amusant blog Les Lectures de Cécile, que je suis, qui m'a finalement décidée à le lire !

Titre: Amok suivi de Lettre d'une inconnue
Auteur: Stefan Zweig
Genre: nouvelle
Pays: Autriche
Date de publication: 1922

Résumé
   L'édition en livre de poche, que j'ai lue, regroupe trois nouvelles de Stefan Zweig ayant pour thème la passion.
   Amok retrace l'histoire d'un médecin de brousse européen installé en Malaisie. Homme assez indolent et retiré du monde, il reçoit un jour la visite d'une lady hautaine qui recquiert ses services pour un avortement discret. Un climat de défi s'installe entre les deux personnages, et ce sera pour ce médecin le point de départ d'une passion dévorante pour cette femme.
   Le sujet de Lettre d'une inconnue est l'amour muet, mais pas moins passionné, qu'une jeune fille autrichienne a porté à un écrivain en vue, son voisin, avec qui elle n'a eu que peu de contacts et qui a toujours agi avec elle d'une façon assez légère.
   Quant à la troisième nouvelle du recueil, La Ruelle au clair de lune, elle met en scène un couple déchiré dont la femme, devenue prostituée, repousse avec cruauté celui qui a été son mari, qui, lui, lui voue un amour passionné et violent. Mais le tourmenteur et le tourmenté ne sont finalement pas ceux qu'on pensait...

Mon avis
   Ce recueil a le grand mérite, que n'ont hélas pas tous les recueils de nouvelles, parfois composés de manière assez arbitraire par les éditeurs, d'avoir une vraie unité. Ces trois nouvelles, relativement longues au demeurant, ont en effet un thème commun: la passion amoureuse dans ce qu'elle a de plus extrême, à la limite du sado-masochisme (particulièrement dans La Ruelle au clair de lune).
   Le thème de la passion amoureuse est traité d'une façon remarquable. En effet, c'est son aspect destructeur, pour soi-même et l'autre, qui est mis en avant dans ces nouvelles. J'ai trouvée très intéressante cette réflexion sur la passion, qui va jusqu'à la folie, l'obsession, l'anihilement de toute volonté, ou réflexion (comme chez la jeune héroïne de Lettre d'une inconnue).
   Ce thème si riche permet aussi d'introduire des personnages fascinants, comme la lady de Amok, énigmatique, distante, cruelle, et qui a pourtant, elle aussi, aimé... Dans Lettre d'une inconnue, c'est le personnage  de la jeune amoureuse qui m'a frappée: sa passion est en effet si forte qu'elle n'arrive pas à avoir un seul reproche ou à être malheureuse à cause de celui qu'elle aime, alors même que celui-ci passe sa vie à l'oublier et à ne pas se rendre compte de son amour silencieux. J'ai trouvé cela assez déroutant, peut-être plus encore que les relations violentes qui existent entre les personnages d'Amok ou de La Ruelle au clair de lune.
   J'ai donc particulièrement apprécié ce recueil, vraiment fascinant. J'ai retrouvé, bien sûr, le plaisir de goûter à une belle écriture ! Ma préférence va sans doute à Amok, où l'atmosphère tropicale ajoute encore à l'étrangeté et à la violence des sentiments, dans ces contrées où "la chaleur rend fous les Européens" selon le personnage principal.

Mon verdict
   5/5, de fascinantes esquisses de la passion.


vendredi 30 janvier 2015

Victor Hugo - Le Dernier Jour d'un condamné

   De Victor Hugo, on retient bien sûr l'immense œuvre poétique avec Les Contemplations, romanesque avec Les Misérables (que j'ai lus plus jeune; en version abrégée, hélas...), et théâtrale avec Ruy Blas qui a inspiré la célèbre Folie des Grandeurs chère à Louis de Funès... Mais Victor Hugo est aussi un auteur engagé en politique, notamment à travers ses Châtiments, ou ce roman,  Le Dernier Jour d'un condamné , qui plaide pour l'abolition de la peine de mort.

Titre: Le Dernier Jour d'un condamné
Auteur: Victor Hugo
Genre: roman à visée argumentative
Date de publication: 1829
Pays: France

Résumé
   Le roman, assez court, revêt la forme d'une journal dans lequel un condamné à mort relate les six dernières semaines de sa captivité avant son exécution. On suit donc son jugement, son attente à la prison de Bicêtre pendant l'attente de l'aboutissement de son pourvoi en cassation, et enfin jusqu'aux dernières minutes précédant son exécution. Le condamné, qui semble être d'un milieu social assez élevé, mais sur lequel on ne sait rien, livre ses angoisses, ses peurs, ses réflexions avant l'heure terrible de son exécution.

Mon avis
   A vrai dire, je n'apprécie pas plus que ça les œuvres littéraires de la période romantique. Mais quand c'est un génie tel que Victor Hugo qui écrit un pareil roman, on ne peut que l'aimer. Le roman est pourtant typiquement romantique: il a une approche très "sentimentale" de la peine de mort, ne serait-ce que par l'analyse des sentiments du condamné, le récit à la première personne, le pathétique de celui-ci, notamment à travers l'évocation de la fille du condamné. J'ai trouvé, justement, l'analyse des ressentis du personnage particulièrement admirable: il oscille entre la lucidité et l'espoir vain, ne parvient pas à se retourner vers la religion même s'il semble croyant, et ses changements d'avis à propos de la pire horreur de la mort ou des galères m'ont fait penser à la fable de La Fontaine "La Mort et le bûcheron". Le message est particulièrement renforcé par l'ignorance qu'a le lecteur de son crime: il ne considère que l'homme, et ce qui le rend pleinement homme, son intériorité.
   A cette vision romantique du condamné s'ajoute une évocation très réussie des bas-fonds du Paris du XIXème -que l'on découvre à travers les yeux du personnage- avec son argot fleuri, ses forçats et ses exécutions capitales en place publique, véritable spectacle divertissant pour la populace. Evidemment, aujourd'hui en France, on a du mal à concevoir cela... C'est vrai que j'ai beaucoup de mal à comprendre cette forme de voyeurisme sordide, le même qui m'avait révoltée dans Elephant Man.
   Et toujours, toujours... le style magnifique de Victor Hugo, qui manie comme personne vocabulaire des sentiments, figures de style, images, pour une force d'expressivité exceptionnelle.
  
Mon verdict
   5/5; une approche typiquement romantique du thème de la peine de mort.

samedi 17 janvier 2015

Michel Tournier - Vendredi ou les limbes du Pacifique

   Encore un roman que je devais lire pour le lycée et que nous allons étudier en œuvre intégrale pour le bac. J'ai déjà parlé ici d'un livre que j'ai dû lire pour le lycée. Il s'agissait des Cerfs-Volants, de Romain Gary, une œuvre que j'avais adorée. J'attendais donc beaucoup de celui-ci qui, d'après ce que j'ai cru comprendre, est un classique du bac.

Titre: Vendredi ou les limbes du Pacifique
Auteur: Michel Tournier
Genre: conte philosophique, réécriture
Date de publication: 1969
Pays: France

Résumé
   Robinson Crusoé, jeune Anglais d'une vingtaine d'années, est le seul rescapé du naufrage du navire La Virginie. Il se retrouve totalement seul, sur une île inhabitée au large du Chili, loin de la côte ou même des îles habitées. Il met alors tous ses efforts dans la construction d'un bâteau, qu'il nomme l'Évasion, afin d'échapper au terrible destin qui l'attend. Mais il a négligé un paramètre de taille lors de sa construction: le poids. Le bâteau est trop lourd pour que Robinson puisse l'amener à la mer. Désespéré, le naufragé s'abandonne alors à la souille: il reste prostré, le corps plongé dans un marécage boueux qui, par une étrange association d'idées, lui rappelle son enfance. Il finira par en sortir pour décider de se reprendre en main et d'organiser sa vie sur l'île, qu'il nomme Speranza, et avec laquelle il entretiendra des relations pour le moins intimes, passant par plusieurs phases successives.

Mon avis
   Enfant, j'avais adoré le Robinson Crusoé de Daniel Defoe. Le moins que je puisse dire au sujet de cette version, c'est qu'elle en diffère totalement.
   En effet, si la version originale était plus un roman d'aventures, celle-ci est un conte philosophique à part entière, abordant les thèmes de la solitude, de la proximité avec la Nature, de la sexualité, et même du racisme. Ceci confère à cet ouvrage un certain intérêt, mais je n'ai franchement pas apprécié. En effet, la philosophie de ce livre penche, selon moi, vers l'ésotérisme, ce qui m'a fait trouver ce conte assez obscur. J'avoue que je n'ai pas tout compris (et c'est une litote...). Le passage de Robinson passant par des phases psychologiques successives m'a cependant intéressée, tout comme les derniers rebondissements de l'intrigue que j'ai trouvés tout à fait porteurs de sens. Ceci dit, les passages d'une phase psychologique à l'autre m'ont paru un peu brutaux. J'ai également du mal avec le mythe du bon sauvage, qui a une place importante, surtout vers la fin du livre: en effet, ne rien faire, ne pas se projeter dans l'avenir, et surtout vivre au gré de ses envies du moment les plus fantasques, n'est-ce pas renoncer à sa qualité d'homme en abdiquant toute volonté et en ne se laissant plus guider que par ses instincts ? De plus, je pense que l'homme est fait pour vivre en société, pour entretenir des relations avec les autres, communiquer avec eux sur tous les sujets possibles. Je n'étais donc pas vraiment d'accord avec la thèse défendue par ce livre; après, cela ne m'a pas empêché de trouver certaines idées intéressantes.
   Une deuxième chose m'a gêné dans ce livre, et je le dis franchement au risque de paraître prude ou vieux-jeu: c'est le rapport vraiment...particulier que Robinson a à la sexalité, rapport présenté comme idéal dans le conte. D'autant plus que le sens à donner à tout cela est plus qu'obscur. Certains détails honnêtement peu ragoûtants et l'emploi de mots qui ne devraient jamais figurer dans la littérature ne m'ont pas plu.
   Ici une petite mise au point s'impose. À ce stade, vous devez me trouver horriblement prude et étroite d'esprit. Ce n'est pas que je n'apprécie pas que la littérature aborde le sujet de la sexualité: si tel était le cas, je n'aurais plus grand-chose à lire... Par exemple, des auteurs comme Zola, qui aborde tout de même ce thème en long, en large et en travers dans la plupart de ses romans (je pense, entre autres, à Nana ou à La Terre), et qui, par ailleurs est mon auteur préféré, ou Maupassant, volontiers grivois, ont l'art extraordinaire d'aborder de tels sujets d'une façon toujours fine, sans employer de mots crus ou vulgaires, et avec le génie qui leur est propre.
   En ce qui concerne la simple forme, je n'ai pas apprécié non plus: j'ai trouvé le style presque pédant tellement il est recherché et alambiqué. Les phrases regorgent d'adjectifs et d'adverbes, chacun de plus de quatre syllabes. D'une façon général, j'ai trouvé que cette abondance de détails, cette richesse de déterminants, nuisait au pouvoir de suggestion du livre. Mon imagination a été peu sollicité et je me suis franchement ennuyé, d'autant plus que j'ai peiné à trouver un sens à tout cela. Malgré tout, j'ai apprécié le système d'énonciation et de point de vue qui oscille entre le point de vue du narrateur omniscient et celui de Robinson.
   Tout compte fait, j'appréhende pas mal le fait de devoir travailler pendant un mois là-dessus...

Mon verdict
1/5, précieux et obscur



vendredi 28 novembre 2014

Sophocle - Œdipe Roi

   Ce n'est pas vraiment dans mes habitudes de lire des pièces de théâtre, encore moins d'assister à des représentations théâtrales. Je dois vous avouer que le théâtre n'est pas mon genre de prédilection. Cependant... comme dirait mon professeur de Grec (oui je suis helléniste), "Qui n'a pas lu Œdipe Roi n'a rien lu". Je l'avais déjà lu il y a fort longtemps, alors j'ai décidé de m'y replonger.
 
Titre: Œdipe Roi
Auteur: Sophocle
Genre: tragédie
Date de publication: Vème siècle av. J-C
Pays: Grèce
 
Résumé
   Œdipe, roi de Thèbes, voit son peuple confronté à un terrible fléau: une malédiction s'est abattue sur la ville. Son beau-frère Créon lui conseille alors de consulter le devin Tirésias pour trouver le moyen d'apaiser le courroux des dieux. Celui-ci serait dû au meurtre impuni du prédécesseur d'Œdipe sur le trône de Thèbes, le roi Laïos. Devant l'insistance du roi, Tirésias finit par avouer le nom du meurtrier: c'est Œdipe lui-même. En effet, frappé par une malédiction divine, Laïos devait enfanter un fils qui le tuerait et épouserait sa propre mère. Effrayé par cette prophétie, lorsqu'un enfant lui était né, il l'avait abandonné dans un ravin. Mais un berger de Corinthe avait recueilli le petit Œdipe et l'avait confié aux souverains de sa ville qui ne parvenaient pas à avoir d'enfants. Devenu plus âgé, Œdipe était parti pour Thèbes afin d'échapper à la prophétie lui annonçant qu'il allait tuer celui qu'il croyait être son père et épouser sa mère. A la croisée d'un chemin, à la suite d'une altercation entre voyageurs, Œdipe avait tué un homme et sa suite. Arrivé à Thèbes, il était parvenu à trouver la solution de l'énigme du Sphinx, libérant ainsi la ville de ce monstre. Il avait alors été sacré roi à la place de Laïos assassiné, et avait épousé sa veuve. Mais il faudra toute la pièce à Œdipe pour qu'il comprenne enfin la funeste vérité...
 
Mon avis
   Comment j'ose donner mon humble avis sur ce monument de la littérature, qui a été un des mythes fondateurs de notre civilisation gréco-latine, une pièce vieille d'il y a plus de 25 siècles, qui a inspiré à Freud sa célèbre théorie psychanalytique du complexe d'Œdipe, je me le demande... je vais cependant essayer.
   Comme vous pouvez l'imaginer, et comme toute tragédie, mais particulièrement celles de Sophocle, Œdipe Roi est caractérisé par le poids écrasant de la fatalité qui pèse sur les personnages. Dès le début de la pièce, on sait que tout va mal se terminer pour ceux qui ont voulu échapper à leur destin. La double horreur du parricide et de l'inceste poursuit le héros jusqu'à la fin. Sa chute sera terrible lors du dénouement. En ceci réside le génie de cette tragédie: le lecteur ou le spectateur observe tout le long de la pièce des personnages qui se débattent contre leur destinée, mais qui fatalement ne pourront lui échapper. Leur faiblesse est totale face à la toute-puissance des dieux. Il faut reconnaître que cela fait frissonner...
   Je dois maintenant vous avouer que j'ai un faible pour la littérature grecque de l'Antiquité, sûrement bien plus que pour la littérature latine. Non seulement, en helléniste convaincue, je tiens la langue grecque pour une des plus esthétiques du monde, mais je suis particulièrement sensible à la beauté, à la poésie, à la force des textes grecques de l'Antiquité. Dernièrement, j'ai été profondément touchée par la magnifique maîtrise de la langue dont fait preuve Lysias dans son discours Sur le meurtre d'Eratosthène. Œdipe Roi ne fait pas exception. La beauté du langage et la force de l'ironie tragique y sont vraiment impressionnantes. J'ai particulièrement aimé un passage du début de la pièce, le dialogue qui voit s'affronter Œdipe qui brûle de connaître le nom du meurtrier de Laïos et le devin Tirésias qui tente de le dissuader de chercher à connaître la vérité, justement pour ces raisons. En outre, par nature, une pièce de théâtre est destinée à être jouée. Je crois bien que c'est la première fois que je n'ai presque pas ressenti de frustration en lisant une pièce de théâtre, car j'ai trouvé les dialogues tout simplement magnifiques si bien que je pense que cela a suffi à mon bonheur !!!
   J'ai cependant un tout petit bémol à ajouter. Même si les personnages comme les interrogations qu'ils suscitent sur le destin sont tout à fait humains et intemporels, j'ai toutefois bien ressenti que cette tragédie avait quelques siècles. En effet, l'écrasement complet des personnages sous le poids du destin ne laisse selon moi pas énormément de place à l'analyse des sentiments, contrairement aux tragédies de Corneille par exemple. De plus, on n'est pas vraiment habitué à cette présence du chœur et à ses chants qui m'ont paru quelquefois obscurs.
   Il n'en demeure pas moins que cette tragédie est, à mon avis, un pur chef-d'œuvre, un bijou de la littérature occidentale, à lire et à faire lire de toute urgence.

Mon verdict
   5/5 bien sûr, un vrai chef-d'œuvre
 

dimanche 23 novembre 2014

Boris Vian - L'Écume des Jours

   Après deux semaines assez denses consacrées à mes devoirs trimestriels, je reviens avec un billet sur ce classique adapté au cinéma il y a peu.

Titre: L'Écume des Jours
Auteur: Boris Vian 
Genre: roman
Date de publication:
Pays: France

Résumé
   Colin est un jeune homme aisé qui vit sans avoir besoin de travailler dans un joli appartement, avec son cuisinier Nicolas, un fin gourmet. Il reçoit régulièrement son ami Chick, passionné pour les oeuvres d'un auteur à la mode, Jean-Sol Partre, dont il achète tous les ouvrages avec une frénésie compulsive. Ce dernier rencontre une jeune fille, Alice, qui avait d'abord plu à Colin, et emménage avec elle. À son tour, Colin rencontre l'amour en la personne de Chloé, jeune fille charmante, avec laquelle il vit un amour passionné et qu'il épouse très rapidement. Mais dès leur voyage de noces, Chloé semble malade, après consultation, Colin apprend qu'elle a un nénuphar qui pousse dans son poumon. Quant à la relation de Chick et Alise, elle ne cesse de se détériorer suite à l'idolâtrie excessive que Chick a pour Partre. Les quatre amis parviendront-ils à surmonter ces épreuves ?

Mon avis
   Tout d'abord, on ne peut parler de ce roman sans parler de son univers si particulier, un univers proche du nôtre mais comportant de nombreux éléments insolites, comme par exemple la cause de la maladie de Chloé. Ce parti-pris de narration est bien évidemment particulièrement original, fantaisiste, poétique et vise à surprendre le lecteur à chaque instant.
   Or, il se trouve, enfin c'est mon avis, que cet univers sert tout à fait la narration. Une histoire d'amour éternelle et tragique, profondément humaine finalement, est traitée de façon inattendue voire surréaliste. Le fond, c'est-à-dire ce thème récurrent de l'amour tragique, est plein de finesse et de charmes dans l'esquisse des personnages et des sentiments.
   L'écriture est bien sûr extrêmement travaillée et recherchée, si bien que chaque bizarrerie ou élément insolite a un sens caché, est une contrepétrie ou un retournement d'une expression toute faite appliquée au sens propre. Concernant ce point, il me semble que ceci pourrait bien agacer ou dérouter certains.
   Pour finir, je n'ai pu m'empêcher de sourire à l'évocation des personnages de Jean-Sol Partre et de Chick, lequel m'a fait penser aux fans actuels !
   En conclusion, j'ai beaucoup apprécié ce roman, même si je conçois qu'il ne plairait sans doute pas à tout le monde.

Pour conclure
   5/5, une tragique histoire d'amour dans un univers surréaliste


vendredi 22 août 2014

Kafka - La Métamorphose

   Me voilà de retour avec une nouvelle cette fois. J'ai de nombreux sujets de billets en attente, deux films et un livre, j'essaierai de poster dans peu de temps.

Titre: La Métamorphose
Auteur: Franz Kafka
Genre: nouvelle fantastique
Date de publication: 1915
Pays: Autriche-Hongrie

Résumé
   Grégoire Samsa est un jeune commis voyageur qui subvient aux besoins de sa famille. Un matin, il se réveille dans le corps d'une sorte d'insecte monstrueux. Bien sûr, il est en butte à des problèmes d'ordre pratique, puisque son grand corps invertébré se révèle difficile à mouvoir. Mais la réaction de sa famille est ce qui l'affecte le plus: il les répugne, et ses parents et sa soeur lui sont d'autant plus hostile qu'il ne rapporte plus la paie nécessaire à la survie matérielle de la famille. Au début, seule sa soeur s'occupera de lui avec un peu de sollicitude, puis sa mère, mais Grégoire sera finalement vite rejeté par les siens.

Mon avis
   Cette nouvelle fantastique est finalement plutôt une nouvelle allégorique, ayant pour thème l'exclusion et le rejet que provoque la différence. En effet, Grégoire est vite mis à l'écart et déconsidéré par toute sa famille qui se montre absolument odieuse à la fin de la nouvelle. L'empathie du lecteur pour le personnage principal est donc importante.  Cette exclusion de la part de sa famille et le dégoût qu'il suscite pousseront même Grégoire, je pense, à la perte de sa dignité et à l'oubli même de son humanité. En cela l'allégorie est remarquable, d'autant plus qu'elle est appuyée par la narration.
   En effet, toute la nouvelle est empreinte, malgré le côté mystérieux et obscur du fantastique de la métamorphose de Grégoire (d'ailleurs jamais décrit dans la nouvelle, et dont on imagine seulement l'aspect repoussant), d'un certain réalisme dans l'évocation des personnages, des lieux, des actions. L'humour se fait même sentir lors de la description du père, vieux commis de banque si fier de son uniforme de travail qu'il en devient ridicule. 
   J'ai également remarqué que les pensées et impressions du héros ne sont finalement presque pas rapportées. Certains pourraient trouver cela gênant. Pour ma part, je trouve que ce procédé permet d'éviter à ce récit de tomber dans le pathos, tandis que l'allégorie, elle, gagne en force de part la suggestion de l'intériorité de Grégoire, adresse à l'imagination du lecteur.
   J'ai trouvé le style de Kafka très agréable à lire. Cette nouvelle faisait partie d'un recueil sur lequel je voulais initialement écrire ce billet. J'ai lu deux autres nouvelles, Le verdict et Le nouvel avocat qui m'ont semblé tellement obscures que j'ai renoncé. Je crains de n'avoir pas la maturité suffisante pour saisir toutes les allégories présentes dans ces nouvelles, même pour La métamorphose où elle était plus évidente. Dans quelques années peut-être... Pour l'instant, je crois que je vais momentanément abandonner Kafka. 

Mon verdict
   3/5, allégorie juste