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dimanche 4 octobre 2015

Kenizé Mourad - De la part de la princesse morte

    Dadée II le retour, me direz-vous... en effet, ces derniers temps, j'ai vraiment eu du mal à poster. Trop de travail, pas le temps, et une panne de wifi n'y sont pas étrangers. Du coup, je ne sais pas trop si je pourrai garder un rythme régulier... Enfin, pendant tout ce temps, j'ai quand même lu 8 livres ! (Eh oui, quand on n'a pas Internet, on s'occupe comme on peut ;).) Donc, voici l'article sur un livre que j'ai lu il y a assez longtemps.

Titre: De la part de la princesse morte
Auteur: Kenizé Mourad
Genre: biographie romancée
Date de publication: 1987
Langue: français

Résumé
    Née dans un palais d'Istanbul, capitale de l'Empire ottoman, au début du XXème siècle, la princesse Selma aura un destin atypique. Fille d'une sultane au caractère bien trempé, la petite fille traverse la période difficile de la guerre de 1914-1918, avec l'occupation de l'Empire ottoman par les occidentaux vainqueurs et la prise de pouvoir de Kemal Pacha, qui chasse la dynastie ottomane. Alors qu'elle est encore petite fille, elle doit s'exiler avec sa mère et son frère au Liban. Malgré quelques discriminations et brimades, malgré la pauvreté qui gagne sa famille, ce sont des années plutôt heureuses qu'elle y passe: jeune fille, Selma est très admirée et court les bals de Beyrouth. Elle jouit d'une certaine liberté qui lui manquait à Istanbul, où les femmes devaient sortir voilées ou rester confinées dans le haremlik. Cependant, la vie qu'elle mène lui pèse: la princesse aspire à un destin grandiose. C'est ainsi qu'elle accepte d'épouser un rajah qu'elle n'a jamais vu et de partir pour les Indes.
Mon avis
   Tout d'abord, l'aspect historique de ce roman n'est pas dépourvu d'intérêt. En effet, l'histoire de l'empire ottoman est souvent mal connue en France; elle n'est pas ou peu enseignée à l'école (ou on n'en garde pas un souvenir impérissable). Aussi, ce roman permet d'avoir un éclairage sur le passé de ce grand pays aux portes de l'Europe. De plus, en ce XXème siècle agité traversé par cette héroïne, l'Empire ottoman n'est pas la seule contrée agitée par une révolution: Selma traverse aussi la lutte pour l'indépendance indienne; et le roman offre aussi de découvrir un
de ses aspects moins évidents, c'est-à-dire les relations entretenues par les rajah, l'aristocratie locale, et les Britanniques. En cela, le roman m'a beaucoup intéressée.
   En outre, De la part de la princesse morte est aussi un roman sur le monde musulman. J'ai découvert le mode de vie à l'orientale, avec les harems, un monde de femmes qui ne restent pas passives, loin de là, mais font souvent montre de plus de volonté que les hommes, mais aussi les nombreuses restrictions et brimades dont y sont victimes les femmes. La souffrance de Selma, femme indépendante, d'être privée de liberté, d'être considérée comme une éternelle mineure à surveiller, fend véritablement le cœur. A travers l'évocation des tensions religieuses en Inde, j'ai aussi beaucoup appris sur les différences entre sunnisme et chiismes, qui m'avaient longtemps laissée perplexe.
   Mais, outre l'aspect historique, certes très présent, ce livre est également, en quelque sorte, un roman. Roman d'apprentissage pour Selma, passée des honneurs à la déchéance sociale, qui découvre les premiers émois amoureux et les difficultés de la vie de couple, ainsi que les ravages de la passion. C'est également un roman qui constitue un véritable hymne à la femme, à sa liberté, à sa volonté, à sa capacité d'empathie, à son courage et sa fierté aussi, qualités dont savent faire preuve Selma et sa mère.
   Mais toute ma sympathie est allée au personnage de Zeynel, eunuque du harem, resté jusqu'au bout fidèle à sa sultane. Son amour sans espoir, plein d'une frustration douloureuse, pour la mère de Selma, dont il a la douleur de voir qu'elle ne le considère pas véritablement comme un homme à part entière, m'a bouleversée. C'est, je trouve, un personnage plein de complexité et de subtilité, un personnage rongé aussi, par cet amour impossible. En cela, il est vraiment original.
   Pour conclure, il s'agit d'un roman passionnant, d'un style très agréable, qui apporte un éclairage historique sur des périodes méconnues sans tomber dans le pompeux ou l'ennuyeux, et c'est pour cela que je l'ai bien apprécié. Je me permettrai uniquement un petit bémol pour quelques passages de la partie indienne qui m'ont paru parfois un peu répétitifs, et pas toujours très clairs. C'est uniquement pour cela que je ne lui donne pas la note maximale.

Mon verdict
   4/5, historiquement éclairant

samedi 27 juin 2015

Emmelene Landon - Le Voyage à Vladivostok

   Encore sous le charme du roman de Maÿlis de Kerangal, Tangente vers l'est, j'ai trouvé amusant de lire un livre sur un thème quasi-similaire, et à l'intrigue voisine, afin de pouvoir comparer les deux romans. C'est pourquoi j'ai emprunté ce Voyage à Vladivostok, dont je n'avais jamais entendu parler.

Titre: Le Voyage à Vladivostok
Auteur: Emmelene Landon
Genre: roman
Date de publication: 2007
Pays: France

Résumé
   Jeannine Aubin, batelière, rencontre un jour dans un port Ivan Kirkov, un Ukrainien marin au long cours basé à Vladivostok. Ils se plaisent, se séparent, se revoient, s'aiment, mais Ivan doit repartir et Jeannine elle-même a embrassé par goût du déplacement la vie de batelière. C'est pourquoi à nouveau chacun d'eux se retrouve seul. Mais la jeune femme se rend compte qu'Ivan lui manque et qu'il faut qu'elle le revoit. Elle décide donc de prendre le Transsibérien pour Vladivostok, ne sachant même pas si elle y retrouvera Ivan.
Mon avis
   A bien des égards, Tangente vers l'Est et Le Voyage à Vladivostok se ressemblent en effet: deux courts romans, relativement faciles à lire, centrés sur des femmes et une intrigue amoureuse. Là où ils diffèrent, c'est que le Voyage à Vladivostok laisse une bien plus large part à cette intrigue sentimentale; l'analyse des sentiments y est donc plus poussée et pourra intéresser les férus de psychologie.
   J'ai découvert avec curiosité le monde des bateliers et des marins, évoqué avec une certaine poésie, d'autant plus que je n'ai vraiment jamais été intéressée par la mer (eh oui, je suis bien une terrienne) et évite donc les livres sur ce sujet. Honnêtement, l'aspect maritime du roman n'est pas assez accentué pour combler les fanatiques du genre, mais suffisamment pour le lecteur lambda. L'univers est donc plutôt agréable.
   Cependant, le gros problème de ce roman est, à mon avis, le style. L'abondance de phrases nominales ou adverbiales (au bas mot 70% du roman) lui confère un aspect haché qui le rend plutôt désagréable à lire, et, j'en conviens, ennuyeux. S'il n'avait pas été aussi court, je l'aurais sûrement abandonné. Les descriptions m'ont semblé assez médiocres et je n'ai pas retrouvé la verve de Maÿlis de Kerangal.
   Du côté de l'intrigue, trop de questions restent en suspens sur certains personnages pour que je sois satisfaite: certains aspects auraient pu être développés plus longuement, comme la raison pour laquelle Ivan est si froid vis-à-vis de son pays: on comprend vaguement que cela a un rapport avec son père mais on n'aura pas plus d'éclaircissements... Mais bon, du coup je me contredis: plus long aurait signifié encore plus ennuyeux donc finalement je reste perplexe...
   Vous comprendrez que l'avantage va donc clairement à Tangente vers l'est, et que je ne vous conseille pas ce Voyage.

Mon verdict
2/5, ennuyeux

samedi 20 juin 2015

Maylis de Kerangal - Tangente vers l'est

   Encore Maylis de Kerangal... Comme j'avais adoré Corniche Kennedy, je me suis jetée sur un autre de ses romans, dont le thème, la Russie, avait tout pour m'attirer !

Titre: Tangente vers l'est
Auteur: Maylis de Kerangal
Genre: roman
Date de publication: 2012
Pays: France

Résumé
    Aliocha, un jeune conscrit russe d'un naturel assez timide, se trouve à bord du Transsibérien avec son contingent , une troupe de soldats frustres et brutaux qui n'ont pas tardé à le prendre pour tête de Turc. Rempli d’appréhension à l'idée du sort hasardeux qui l'attend à la caserne, il n'a qu'une idée en tête: déserter. Une nuit, il rencontre une Française, Hélène, qui vient de quitter son amant russe. Malgré la barrière de la langue, ils sympathisent et Aliocha finit par la supplier de le laisser se cacher dans son compartiment jusqu'à ce qu'il puisse quitter le train à un moment opportun. Contre toute attente, la jeune femme accepte et c'est une étrange cohabitation qui commence.

Mon avis
  Une fois de plus, je n'ai pas été déçue. J'ai dévoré d'une traite ce roman assez court qui se lit très facilement. Les personnages sont esquissés tout à fait justement et je m'y suis attachée rapidement, même si somme toute le lecteur en sait peu sur eux.
   J'ai trouvé également très intéressant d'avoir un aperçu de la Russie d'aujourd'hui, puisque c'est vrai qu'on connait mieux en général la Russie du XIXème ou de l'ère soviétique. J'ignorais même, je l'avoue, que le service militaire y existait encore, et pour moi qui ne l'ai pas connu, cet aperçu n'était pas dénué d'intérêt. Évidemment, dans un roman aussi court, on n'aura pas une vision globale, mais on se rendra tout de même compte de certains problèmes qui gangrènent ce pays aujourd'hui (je pense notamment à l'alcool ou à la pauvreté). J'ai donc apprécié cet aspect naturaliste.
   Il faut également ajouter que Maylis de Kerangal a un véritable don pour créer des atmosphères, et c'est, je pense, ce qui contribue à ce que je "rentre" aussi vite dans ses romans. L'évocation du lac Baïkal était ainsi particulièrement remarquable.
   Quant au style, je l'aime énormément, je dois l'avouer. L'écriture est suffisamment originale pour retenir l'intérêt et la curiosité du lecteur et suffisamment classique pour plaire au plus grand nombre. J'ai aussi souri à certaines pointes d'humour à propos du personnage d'Hélène, qui "a de la Russie une vision tragique et lacunaire, montage confus où s'enchaînent la chute fatale d'un landau dans un escalier monumental d'Odessa, le tison brûlant sur les yeux de Michel Strogoff, la gymnaste Elena Moukhina qui voltige aux barres asymétriques, le visage de Lénine, fiévreux, haranguant la foule, le drapeau de l'Union Soviétique au sommet du Reichstag, les photos trafiquées, les sourcils de Brejnev et la barbe de Soljenitsyne, La Mouette à l'Odéon un soir de printemps, les milliers de prisonniers qui creusent un canal entre la Mer Baltique et la Mer Blanche, Noureïev qui bondit par-dessus la barrière dans un aéroport, un défilé de chars sur la place Rouge [...]"

   J'ai donc, encore une fois, adoré ce roman, et commence à apprécier, finalement, ces fins abruptes qui laissent tout le loisir d'imaginer ce qui arrive ensuite aux personnages.


Mon verdict
        5/5, un grand roman



    Sinon ça y est j'ai passé le bac de Français ! L'objet d'étude à l'honneur cette année, le théâtre, n'était pas vraiment celui que j'espérais et je connaissais mal les pièces étudiées (Phèdre de Racine, Le Roi se meurt de Ionesco et Le Tigre bleu de l'Euphrate de Laurent Gaudé). J'ai joué la carte de la sécurité en choisissant le commentaire de l'extrait du Tigre bleu de l'Euphrate. Honnêtement je ne pense pas avoir fait quelque chose de mirobolant, mais je ne m'en suis finalement pas si mal tirée, je pense.
   Et j'ai profité de ma semaine de révision pour me venger de tout ce temps où j'ai lu au compte-goutte: j'ai bien dû lire 2 ou 3 livres par jour (bon, en comptant les Profil Bac pour l'oral). J'ai été très ambitieuse dans mes choix à la bibliothèque et vous prévois pour d'ici quelque temps plusieurs articles !

dimanche 26 avril 2015

Laclos - Les Liaisons dangereuses

    Me revoilà avec un classique un peu sulfureux...

Titre: Les Liaisons dangereuses
Auteur: Pierre Choderlos de Laclos
Genre: roman épistolaire
Date de publication: 1782
Pays: France

Résumé
   La Marquise de Merteuil et le Vicomte de Valmont sont deux libertins, multipliant les aventures. Anciens amants, ils s'écrivent régulièrement. C'est cette correspondance fictive, à laquelle s'ajoute celle de quelques autres protagonistes de l'intrigue, qui est présentée dans ce roman. La Marquise de Merteuil, jeune veuve que toute la bonne société croit irréprochable, veut se venger d'un de ses anciens amants. Pour cela, elle imagine de débaucher sa jeune fiancée, Cécile de Volanges, fraîchement sortie du couvent. De son côté, le Vicomte de Valmont veut séduire une femme mariée, la Présidente de Tourvel. Mais Madame de Volanges met en garde la Présidente contre Valmont, gâtant ainsi ses chances. Il décide donc de s'allier à la marquise pour déshonorer la jeune Cécile et faire éclater un scandale après son mariage. La Marquise, qui a ses entrées chez les Volanges, deviendra pour cela la confidente de Cécile, la poussant dans les bras d'un jeune homme amoureux d'elle, le Chevalier Danceny. De son côté, le Vicomte gagnera la confiance du Chevalier afin de le manipuler.

Mon avis
   Je vous avoue tout d'abord que je ne suis pas une grande amatrice de romans du XVIIème ou du XVIIIème, ni de romans épistolaires. Pourtant...j'ai bien dû réviser mon avis.
   En effet, j'ai vraiment apprécié ce roman. Cela tient principalement à l'admirable analyse des sentiments. Le paradoxe est que, si les Liaisons traitent principalement d'amour, c'est bien le sentiment le moins présent, au détriment de l'envie, de la jalousie, du ressentiment, de l'orgueil, et de l'amour-propre. C'est donc tout d'abord cette originalité qui m'a intéressée. En effet, de tous les personnages, aucun n'est vraiment et sincèrement amoureux, puisque même les personnages les plus candides, Cécile et le chevalier, tireront profit des "leçons" des deux comparses et feront preuve de duplicité. 
   Le thème principal du roman est donc la manipulation. Alors que personne ne s'en doute, ce sont la marquise et le Vicomte qui tirent les ficelles de l'intrigue pour parvenir à leurs fins. Les personnages, tant manipulateurs que manipulés, sont remarquablement esquissés: les deux libertins sont épouvantables de cynisme et, il faut le dire, d'ingéniosité; les autres sont finalement totalement écrasés par ces deux figures de démiurges, n'ayant à leur opposer que leur naïveté, leur crédulité, et leur manque de discernement. Les personnages les plus sympathiques sont finalement, je trouve, la Marquise et le Vicomte, puisque leur ingéniosité et, finalement, leur lucidité froide et calculatrice est bien plus intéressante que la faiblesse des autres. Cette supériorité de personnages aussi noirs confère donc au roman une bonne part de son intérêt et de son originalité.
   En ce qui concerne l'intrigue, d'ailleurs passionnante, les machinations machiavéliques se succédant à une cadence impressionnante, je n'ai eu qu'une seule petite déception: j'ai en effet trouvé la fin un peu clémente pour certains personnages et un peu trop "morale"; mais sans doute l'époque l'exigeait-elle.
   De plus, j'ai redécouvert le roman épistolaire; il est vrai que ce genre m'a donné une nostalgie de ce moyen de communication merveilleux qu'est la lettre, qui invite, je trouve, à l'usage du beau langage. En tant que philatéliste, mon amour de la lettre était déjà bien présent, mais en tant que membre d'une génération où l'on n'écrit plus, ce roman m'a donné envie de reprendre la plume.
   Ma conquête a été cependant achevée par l'humour du ton persifleur de la Marquise et du Vicomte, chez qui on découvre parfois des insinutions peu amènes assez amusantes.

Mon verdict
   4,5/5; un savoureux roman sur la manipulation et la noirceur de l'âme humaine

   

dimanche 5 avril 2015

Maylis de Kerangal - Corniche Kennedy

   Cela doit bien faire un mois que je n'ai rien posté...et je n'ai qu'à peine lu... J'en suis désolée; le trvail en est principalement la cause. Je m'étais replongée dans Les Frères Karamazov de Dostoïevski, que j'avais commencé en 3ème et dont j'avais arrêté la lecture à la page 400... Las, je n'ai pas fait mieux puisque le livre m'est tombé des mains 150 pages plus loin. Je désespère de le terminer un jour. Je me suis donc rabattue sur un roman plus récent de Maylis de Kerangal, dont ma grand-mère avait beaucoup aimé le très salué Naissance d'un pont (Goncourt des Lycéens).

Titre: Corniche Kennedy
Auteur: Maylis de Kerangal
Genre: roman
Date de publication: 2008
Pays: France

Résumé
   Dans la ville de Marseille, sur une corniche réputée mal famée, des jeunes de différents horizons se rassemblent tous les après-midi, pour se livrer à une occupation qui ressemble à un rite initiatique: plonger dans la mer du haut de plusieurs promontoires de 3, 7 et 12 mètres. Tous les jours, un policier les observe, Sylvestre Opéra, commissaire chargé de la sécurité du littoral, avant de se replonger dans les affaires crapoteuses qu'il a l'habitude de traiter. Mais sur ordre du maire de la ville, ce sera un véritable affrontement, fait de courses-poursuites et de cache-cache, qui se tiendra entre la police et les adolescents, sur fond de trafic de drogue.

Mon avis
   Autant le dire tout de suite: j'ai été véritablement happée par ce roman. En effet, il se lit très vite (180 pages à peu près), l'intrigue est puissante et les personnages poignants.
   Le conflit adultes/jeunes, même s'il est parfois, je trouve, légèrement caricatural, sonne plutôt juste. Cette peinture de la jeunesse, exaltée, cherchant un but, pleine de vitalité, d'entrain, un peu irrationnelle, m'a séduite. Ce groupe de jeunes est une véritable petite société aussi, avec ses règles, ses codes, ses chefs, ses valeurs. J'ai trouvé également très intéressante l'évocation de la criminalité à Marseilles, avec les différents traffics, les meurtres et le proxénétisme. 
   Les personnages sont tout aussi captivants, notamment de part la diversité de leurs origines: si certains habitent dans des HLM des quartiers nords, d'autres ont des parents petits voire grands bourgeois pour l'une d'entre eux, personnage assez énigmatique d'ailleurs. Ces adolescents sont émouvants, agaçants, attachants, mais ne laissent pas de marbre. Je pense par exemple au plus jeune, Mario, véritable Gavroche des temps modernes. De même, le personnage du flic, ravagé, blessé et hanté par le souvenir d'une femme qu'il a croisée, et pourtant si humain, m'a plu. 
   Le style de Maylis de Kerangal est, j'en suis consciente, assez spécial: vif, parsemé d'onomatopées, omettant volontiers des virgules ou usant du langage familier, comme capable de descriptions magnifiques et, je trouve, très poétiques. S'il m'a légèrement décontenancée de prime abord, je l'ai vite beaucoup apprécié; d'autant plus que son adéquation avec le thème et l'histoire en elle-même est grande.
   Je suis peut-être un peu enthousiaste en usant de cette comparaison, mais ce roman a, j'ai trouvé, quelque chose de zolien: peut-être par certains aspects du style et parti-pris narratifs, ou par cette sorte de réalisme voire de naturalisme qui caractérise ce roman. Autant vous dire que je l'ai beaucoup apprécié, et que je peux avancer sans hésiter que c'est un roman qui m'a marquée, malgré quelques manques d'originalité et une fin trop abrupte à mon goût.

Mon verdict
   4,5/5; un âpre roman réaliste très réussi sur la jeunesse

mardi 10 février 2015

Stefan Zweig - Lettre d'une inconnue

   Après une éprouvante semaine de devoirs, je reviens avec ma dernière lecture, une oeuvre de Stefan Zweig dont j'avais déjà entendue parlé, mais c'est l'amusant blog Les Lectures de Cécile, que je suis, qui m'a finalement décidée à le lire !

Titre: Amok suivi de Lettre d'une inconnue
Auteur: Stefan Zweig
Genre: nouvelle
Pays: Autriche
Date de publication: 1922

Résumé
   L'édition en livre de poche, que j'ai lue, regroupe trois nouvelles de Stefan Zweig ayant pour thème la passion.
   Amok retrace l'histoire d'un médecin de brousse européen installé en Malaisie. Homme assez indolent et retiré du monde, il reçoit un jour la visite d'une lady hautaine qui recquiert ses services pour un avortement discret. Un climat de défi s'installe entre les deux personnages, et ce sera pour ce médecin le point de départ d'une passion dévorante pour cette femme.
   Le sujet de Lettre d'une inconnue est l'amour muet, mais pas moins passionné, qu'une jeune fille autrichienne a porté à un écrivain en vue, son voisin, avec qui elle n'a eu que peu de contacts et qui a toujours agi avec elle d'une façon assez légère.
   Quant à la troisième nouvelle du recueil, La Ruelle au clair de lune, elle met en scène un couple déchiré dont la femme, devenue prostituée, repousse avec cruauté celui qui a été son mari, qui, lui, lui voue un amour passionné et violent. Mais le tourmenteur et le tourmenté ne sont finalement pas ceux qu'on pensait...

Mon avis
   Ce recueil a le grand mérite, que n'ont hélas pas tous les recueils de nouvelles, parfois composés de manière assez arbitraire par les éditeurs, d'avoir une vraie unité. Ces trois nouvelles, relativement longues au demeurant, ont en effet un thème commun: la passion amoureuse dans ce qu'elle a de plus extrême, à la limite du sado-masochisme (particulièrement dans La Ruelle au clair de lune).
   Le thème de la passion amoureuse est traité d'une façon remarquable. En effet, c'est son aspect destructeur, pour soi-même et l'autre, qui est mis en avant dans ces nouvelles. J'ai trouvée très intéressante cette réflexion sur la passion, qui va jusqu'à la folie, l'obsession, l'anihilement de toute volonté, ou réflexion (comme chez la jeune héroïne de Lettre d'une inconnue).
   Ce thème si riche permet aussi d'introduire des personnages fascinants, comme la lady de Amok, énigmatique, distante, cruelle, et qui a pourtant, elle aussi, aimé... Dans Lettre d'une inconnue, c'est le personnage  de la jeune amoureuse qui m'a frappée: sa passion est en effet si forte qu'elle n'arrive pas à avoir un seul reproche ou à être malheureuse à cause de celui qu'elle aime, alors même que celui-ci passe sa vie à l'oublier et à ne pas se rendre compte de son amour silencieux. J'ai trouvé cela assez déroutant, peut-être plus encore que les relations violentes qui existent entre les personnages d'Amok ou de La Ruelle au clair de lune.
   J'ai donc particulièrement apprécié ce recueil, vraiment fascinant. J'ai retrouvé, bien sûr, le plaisir de goûter à une belle écriture ! Ma préférence va sans doute à Amok, où l'atmosphère tropicale ajoute encore à l'étrangeté et à la violence des sentiments, dans ces contrées où "la chaleur rend fous les Européens" selon le personnage principal.

Mon verdict
   5/5, de fascinantes esquisses de la passion.


dimanche 14 décembre 2014

Pierre Boutron - Le Silence de la mer (film)

   J'avais lu la nouvelle de Vercors, Le Silence de la mer, il y a environ 3 ans, et j'en avais gardé un souvenir impérissable. J'ai donc décidé d'en regarder une adaptation, en l'occurrence le téléfilm de Pierre Boutron sorti en 2004.

Titre: Le Silence de la mer
Réalisateur: Pierre Boutron
Acteurs principaux: Michel Galabru, Julie Delarme, Thomas Jouannet
Genre: drame sentimental
Année de sortie: 2004
Pays: France, Belgique

Résumé
   Après la défaite de 1940, un petit village de Normandie connaît les heures sombres de l'occupation. Jeanne, orpheline, vit avec son grand-père dans une grande maison. Musicienne, elle donne des cours de piano aux enfants du village. Réservée et décidée, elle ne cesse de repousser les avances de son cousin Pascal qui l'aime depuis longtemps. Un soir, une chambre est réquisitionnée chez son grand-père pour un officier allemand, le capitaine Werner von Ebrennac. Par fidélité patriotique et honneur, Jeanne et son grand-père lui opposeront un mur de silence perpétuel, ne voulant même pas avoir l'air de remarquer sa présence. Cependant, le capitaine est un homme intelligent et cultivé. Grand francophile, il est sceptique vis-à-vis du nazisme. Jeanne ne tardera pas à succomber à son charme...

Mon avis
   J'avais gardé un souvenir très marquant de la nouvelle de Vercors adaptée par ce film. Je n'ai absolument pas été déçue. Le film est d'une grande fidélité à la nouvelle dans l'esprit, et c'est ce qui, à mon sens, est le plus important. En effet, quelques péripéties concernant par exemples les débuts de la Résistance, ont été ajoutées dans le scénario, de même que certains éléments de la nouvelle qui ont été développés dans le téléfilm. Cependant, ces ajouts respectent toujours l'esprit de la nouvelle et ne font jamais perdre de vue l'intrigue principale. La scène de la fin, par exemple, est une pure invention des scénaristes, pourtant elle est d'un effet saisissant. Comme le narrateur du Silence de la mer, le réalisateur réussit le tour de force de produire un film où il ne se passe rien, où peu de mots sont échangés, et qui pourtant n'est jamais ennuyeux et garde une force exceptionnelle.
   Le jeu des acteurs est de beaucoup dans la réussite du film. Les échanges de regards entre Jeanne et le capitaine sont merveilleux, ils sont toujours très expressifs sans être forcés. De façon générale, les acteurs sont vraiment excellents.
   Bien sûr, comment parler de ce film sans dire quelques mots sur son thème et son intrigue. Cette fidélité, cette ténacité qui caractérisent les personnages de Jeanne et de son grand-père sont extraordinaires. Jamais ils ne faillissent à la résolution implacable qu'ils ont prise. Ceci est très bien rendu dans le film; à plusieurs reprises, on voit les lèvres de Jeanne bouger, comme si elle allait se décider à sortir de son silence. Mais elle n'a pas un mot pour celui qu'elle considère comme son ennemi. Ce film est aussi très intéressant en ce qui concerne la guerre. C'est en effet un combat entre le patriotisme et le sens de l'honneur de Jeanne, et ses sentiments. Bien sûr, ce combat est perdu d'avance et la cruauté de la guerre restera un obstacle infranchissable pour les deux amoureux.
   Ce film est également un des rares qui m'ait vraiment émue (avec Elephant Man, de David Lynch). Je dois avouer que je n'ai pu contenir mes larmes (il m'était arrivé la même chose à la lecture de la nouvelle, d'ailleurs). Et s'il s'adresse tant à l'émotion, c'est parce qu'il joue énormément sur l'implicite, la suggestion, ce fameux silence de la mer qui est loin d'être inexpressif.
   C'est donc avec un très grand plaisir que j'ai découvert ce téléfilm, que je recommande chaudement. Il m'a donné envie de relire la nouvelle et de visionner le film de Jean-Pierre Melville de 1947 qui est, paraît-il, bien plus connu. En tout cas, pour être mieux que cette adaptation, il devrait vraiment être exceptionnel.

Mon verdict
   5/5, magnifique